Cinéma & Série TVComics, Mangas & BD

[Critique] Venom

[Critique] Venom

Les films de super-héros sont légions depuis une dizaine d’années maintenant. Depuis ses balbutiements pleins d’effets numériques et de costumes relativement kitschs, ce raz-de-marée est devenu un genre à part entière : le film de super-héros. Ce dernier a cherché à se démarquer de cette image enfantine et réductrice, en proposant des histoires intéressantes, qui se renouvellent (plus ou moins bien) à chaque film, avec des personnages profonds et des effets spéciaux maîtrisés. Et dans cette volonté de singer la formule Marvel Cinematic Universe, qui consiste à raconter des intrigues dramatiques et sérieuses avec un humour marqué, plus d’un studio s’est engouffré dans cette aventure super-héroïque en adaptant à tout va des personnages plus ou moins obscurs. Certains diront que cet humour made in Marvel est risible et trop insistant pour se révéler véritablement efficace. Personnellement, je trouve que Marvel Studios a trouvé, depuis quelques années et quelques films, le juste milieu entre le sérieux de leurs récits et l’humour allégeant l’atmosphère, sans pour autant ruiner les enjeux dramatiques mis en place.

Au milieu de cette bataille super-héroïque menée à grands coups de budgets astronomiques et de studios voulant capitaliser au maximum sur ce phénomène tout en lui donnant une certaine légitimité, s’écrase Venom, le premier film du Sony’s Universe of Marvel Characters de Ruben Fleischer (Bienvenue à Zombieland, Gangster Squad). Beaucoup d’encre et de venin a coulé sur cette production à 100 millions de dollars au postulat de base… Particulier : faire un film sur Venom, nemesis incontournable de Spider-Man, sans aucun lien ni référence à l’homme-araignée. Sceptique dès l’annonce de ce projet étrange, j’ai ensuite été rassuré par l’étonnante présence de Tom Hardy dans le rôle principal. Naïvement, je me disais qu’un acteur d’une telle envergure ne participerait pas à un film s’il ne valait pas un minimum son attention, et la nôtre. Mais au bout du compte, après avoir lu des critiques assassines au possible, j’ai eu encore plus envie de voir le film pour me faire mon propre avis, pensant encore innocemment que le résultat final ne pouvait pas être si catastrophique. Alors finalement, vais-je défendre un autre long-métrage considéré comme une purge à sa sortie comme Bright ou Solo : A Star Wars Story ? Pas sûr…

Alors l’histoire, que je vous résume ici rapidement parce qu’elle n’étincelle pas pour son originalité : Un vaisseau de la Life Fondation ramène sur Terre des échantillons de vie extraterrestre. L’un de ces organismes aliens parvient à s’échapper après le crash dudit vaisseau. Parallèlement à ça, Eddie Brock, journaliste trublion, perd son travail et sa fiancée en interrogeant Carlton Drake sur les décès dissimulés de personnes ayant participé à certaines de ses expériences. Pour prouver ses accusations, Eddie va s’introduire dans les laboratoires de la Life Foundation. C’est là-bas qu’un cobaye va l’attaquer. L’occasion rêvée pour le symbiote, les fameux organismes extraterrestres, de s’introduire dans son corps. Avec Venom en sa possession, Eddie Brock devient la cible des employés de Carlton Drake, prêt à tout pour récupérer son symbiote. Au-delà du rapprochement cocasse mais sans pertinence que l’on peut faire entre le début de ce film, et la fin de Life, avec Ryan Reynolds, que certaines personnes ont perçu comme un préquel à Venom, on ne peut pas dire que le scénario soit particulièrement palpitant.

Avec mon glaive en plastique et mon cosplay approximatif de gladiateur, je pénètre sans plus tarder dans l’arène pour vous transmettre ma déception suite au visionnage de Venom. Comme je vous l’ai expliqué, d’un désintérêt certain, je suis devenu de plus en plus hypé par ce projet incongru. Tout d’abord, le casting m’a créé en moi un maigre regain d’intérêt pour ce film. J’ai déjà parlé de l’espoir qu’a créé en moi la présence de Tom Hardy dans le rôle d’Eddie Brock, mais il faut savoir que j’ai été aussi ravi de voir Riz Ahmed, époustouflant dans Les Frères Sisters de Jacques Audiard notamment, campé le rôle de l’antagoniste et Michelle Williams (Shutter Island, The Greatest Showman, Manchester by the sea) en compagne d’Eddie Brock. Cependant, si un bon casting suffisait à faire un bon film, ça se saurait.

Sans plus tarder, parlons enfin du film. Et autant commencer par le plus gros morceau, la plus grosse douche froide du film : Venom. Qu’est-ce qu’ils ont fait à ce pauvre symbiote ? Ici, il ne cesse de parler tout le temps, et bien trop souvent pour faire des blagues qui tombent presque constamment à l’eau. Heureusement, Venom s’illustre également en tant que conseiller conjugal, vocation que je ne lui avais pas décelé dans mes lectures ! Bien sûr, je suis ironique. Le traitement de Venom m’a consterné tout du long. Et pour justifier l’absence de Spider-Man, quel procédé a été utilisé ? Très simple : le namedropping lors d’une scène insignifiante d’un « fiasco du Daily Bugle« , obligeant Eddie Brock et sa compagne d’habiter à San Franscico. Comme c’est pratique.

En plus, peut-être dans l’optique de lorgner du côté de l’humour « adulte » des films Deadpool, des légions de blagues absurdes et navrantes viennent assiéger le spectateur tout au long du film. En plus de leur inefficacité, elles viennent complètement ruiner la crédibilité du symbiote et de l’intrigue qui nous est proposée. Aucun personnage, pas même la vendeuse de l’épicerie asiatique, ne prend au sérieux Venom. Au final, même Venom en personne se trahit lui-même en changeant bien trop vite d’avis concernant ses plans. Juste parce qu’il a côtoyé Eddie Brock quelques heures, qu’il voit comme un « looser », à la vie similaire à la sienne lorsqu’il était sur sa planète (si, si, je vous assure, c’est ce qu’il dit), Venom décide de ne plus vouloir envahir la Terre mais au contraire, de la protéger de ses congénères et du méchant Riot. Respectez-le un peu le pauvre, d’autant plus que son apparence physique a au moins le mérite d’être réussie et d’en imposer.

Le manque de logique de l’intrigue continue de piétiner la crédibilité de Venom et du film. Ce dernier s’attarde longuement, trop longuement même, sur le fait que le processus de symbiose, c’est-à-dire de fusion entre le symbiote et son réceptacle humain, se révèle être très périlleux et aléatoire. Puis, une fois qu’Eddie Brock a réussi à « adopter » Venom, tout le monde finit par y arriver soudainement. On renie dès lors tout ce qui a été dit avant pour laisser place à un florilège d’hôtes en tout genre. Un chien, la copine d’Eddie, Carlton Drake, bref, c’est la fête. Même Riot, le symbiote hostile du film qui s’échappe de la navette spatiale au début du film, change d’hôte comme de chemises sans aucune difficulté. Les fondements de l’intrigue se retrouvent donc très vite ébranlés et laissent un trou béant qu’essayent de combler tant bien que mal des scènes d’action peu nombreuses et pas spécialement réussies d’une part, mais aussi et surtout de l’humour omniprésent et malvenu d’autre part. Alors oui, j’en reviens à parler des blagues. Mais vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point elles ne fonctionnent pas dans le film, à moins de l’avoir vu. Elles paraissent toutes plus forcées les unes que les autres. Et surtout… Elles n’ont rien à faire là, c’est un film sur Venom, pas sur Wade Wilson bon sang !

"J'en ai marre de ces conneries !"

Du fait de cette ambiance grotesque qui surplombe l’hypothétique maturité que semble vouloir adopter le long-métrage en règle générale, rien ne semble crédible. Même les acteurs, ayant pourtant largement prouvé leur talent à travers d’autres films, semblent ne pas savoir comment s’y prendre pour sauver les meubles et finissent par cabotiner. Mention spéciale à Tom Hardy, que j’ai adoré dans The Dark Knight Rises, dans Mad Max : Fury Road ou dans la série Taboo, qui finit ici par grimacer ridiculement pour essayer de faire transparaître l’effet qu’a Venom sur le corps d’Eddie Brock. Pour ne rien arranger, son personnage semble perpétuellement ahuri, comme une sorte d’imbécile heureux acceptant bien trop facilement ce qui lui arrive. Riz Ahmed, dans son rôle d’antagoniste faussement gentil vraiment méchant, s’en sort un peu mieux que son collègue mais n’arrive pas pour autant à faire oublier sa symbiose bien trop expéditive avec Riot.

Vous l’avez probablement compris, le film possède également un sérieux problème de rythme. La partie où Eddie Brock n’est qu’Eddie Brock s’éternise inutilement. Le film a l’air de lui-même s’en rendre compte, puisqu’il décide ensuite de passer la seconde et d’expédier complètement la rencontre entre Carlton Drake et Riot, ainsi que le combat final, véritable bouillie numérique illisible nous renvoyant aux heures les plus sombres du genre super-héroïque. Pourtant, le film se révèle plus violent que je ne l’aurais imaginé. PG-13 oblige, on ne voit pas grand chose niveau hémoglobine. Pourtant, Venom dévore ouvertement quelques têtes à de (trop) rares occasions.

Ce ne sont donc pas les effets visuels ratés, à l’exception de l’apparence des symbiotes, qui aideront le film à contre-balancer les défauts précédemment énoncés. Ce qui est d’autant plus regrettable que le long-métrage possède quelques rares bonnes idées visuelles, comme la première apparition de Venom, supplantant ses yeux à ceux d’Eddie Brock dans un miroir, ou le bref passage durant la bataille finale où les symbiotes se séparent partiellement de leurs hôtes pour laisser entrevoir le combat dans sa globalité, qui se déroule entre les symbiotes mais aussi entre Eddie Brock et Carlton Drake.

Ce ne sont pas non plus les musiques quelconques au possible qui aideront le film à remonter la barre durant son naufrage. Et ce n’est sûrement pas non plus la scène post-générique qui y parviendra davantage. Attention, pour ceux qui aimeraient garder la surprise, je m’en vais de ce pas pour la dévoiler, on se retrouve donc pour la conclusion en gras. Comme je le disais, la scène post-générique annonçant l’arrivée de Carnage dans une éventuelle suite laisse présumer que Woody Harrelson, un autre grand acteur brillant s’étant illustré dans Bienvenue à Zombieland (tiens donc) ou dans le magnifique Three Billboards : Les panneaux de la vengeance, a réussi à se faire embourber dans ce projet casse-gueule. D’ailleurs, lui non plus ne semble pas savoir comment rendre plausible son personnage et finit lui aussi par surjouer.

D’un projet vraisemblablement pensé dans l’unique but de capitaliser au maximum sur les personnages super-héroïques dont le studio a les droits, résulte de manière assez prévisible un film bancal en tout points. Malgré des acteurs prestigieux, aucun d’entre eux n’arrivent à crédibiliser son personnage et encore moins l’histoire qui est racontée. Histoire qui perd toute logique dès les premières minutes du film, alors qu’elle prend bien trop de temps à exposer la difficulté de la symbiose. L’aspect visuel des symbiotes est néanmoins réussi, Venom évidemment, mais aussi Riot ou encore l’apparition éclair de She-Venom. Par contre, les autres effets spéciaux sont bien moins convaincants et franchissent largement la limite du ridicule, surtout pour un budget aussi faramineux. Rien autour du scénario n’arrive davantage à rehausser un tant soit peu le niveau, ni la musique, ni l’action à la violence relativement aseptisée bien que présente, ni même les scènes post-générique, dont l’une sert uniquement de piqûre de rappel sur les qualités du film d’animation Spider-Man : Into the Spider-Verse à venir. Venom est donc un échec cinématographique, éprouvant pour les fans de comics, qui transforme le potentiel d’un personnage sombre et brutal en une comédie insipide, et rétrograde pour le genre super-héroïque. Pourtant, malgré ses nombreux défauts, le long-métrage représente un pari réussi pour Sony d’un point de vue financier. Ma seule interrogation autour d’une éventuelle suite est alors de savoir si Tom Hardy se laissera à nouveau embarquer dans ce projet douteux, qu’il n’a pas l’air d’avoir spécialement apprécié.

En tout cas, je ne vous conseille pas de vous rendre en salles si vous n’y êtes pas encore allé, il y a fort à parier que vous le regretterez.

Cette (longue) critique sur cet objet cinématographique non-identifié est terminée. J’espère qu’elle vous aura plu ! Je serais ravi d’échanger avec vous autour du film, n’hésitez donc pas à partager votre avis dans les commentaires. ^^

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.