Comics, Mangas & BD

[Review] I Kill Giants

[Review] I Kill Giants

J’ai ressenti une étrange sensation. Bien loin d’un grand bouleversement dans la Force, j’ai été très agréablement surpris face à ma dernière lecture, I Kill Giants. En voyant le titre et la couverture du comics scénarisé par Joe Kelly (DeadpoolSpider-Man/DeadpoolSuperman : Godfall) et dessiné par le mangaka Ken Niimura (Umami, Henshin), je m’attendais simplement à lire une histoire fun, sans prise de tête et un peu enfantine. J’étais bien loin, bien loin du compte…

Nous suivons Barbara Thorson, une jeune fille de 13 ans qui paraît vivre dans un monde complètement en décalage avec celui de ses camarades de classe et de sa grande sœur. Et pour cause, elle est une chasseuse de géants. A l’aide de Coveleski, son marteau géant, elle affronte les géants et craint le retour sur Terre des titans, monstres capables de tout détruire sur leur passage. Dans notre monde banal, elle distingue une multitude de créatures qu’elle est la seule à percevoir et ce don va lui causer bien du tort.

La grande force d’I Kill Giants réside dans la maturité qui émane de l’écriture de Joe Kelly. Comme beaucoup, je m’attendais à des affrontements grotesquement épiques dans un univers enfantin quand j’ai ouvert ce livre. En aucun cas je ne m’attendais à voir des sujets complexes tels que le harcèlement scolaire traités avec justesse et parfaitement retranscrits. Barbara, dont le nom de famille rappelle un certain dieu du tonnerre, vit dans l’isolement et la solitude perpétuelle. Étant seule à voir toutes sortes de créatures bienveillantes ou non, elle n’est jamais prise au sérieux par son entourage. La protagoniste du comics, malgré son jeune âge, assume sa mission malgré tout et parvient à être touchante et émouvante tout au long du récit. Le doute permanent sur la véracité de l’existence de ces créatures la rend à la fois mystérieuse mais aussi très vulnérable. Le lecteur prend immédiatement Barbara en affection et a envie de croire dur comme fer en son discours, en dépit de tous les éléments qui viennent la contre-dire et de son comportement en société exécrable. En effet, son mal-être l’a fait devenir méchante voire violente, même avec les quelques personnes qui aimeraient l’aider.

Autour de cette petite fille tourmentée se trouve deux types de personnes : celles qui la considèrent comme étant folle, la brimant et celles qui essayent de l’aider à tout prix. La grande sœur de Barbara se trouve dans la première catégorie. Véritable bourreau de travail, elle se montre complètement obnubilée par sa carrière professionnelle. Karen vit comme un terrible fardeau l’obligation de s’occuper de sa petite sœur et de son petit frère. Leur père loin du foyer et leur mère gravement malade, elle doit subvenir seule aux besoins de sa famille. Karen perçoit d’un très mauvais œil les agissements de Barbara, sa passion pour les jeux de rôle et ne croit pas un mot de sa mission. Entre ses tentatives d’être une grande sœur correcte et son exaspération face à la vie rythmée uniquement par le travail qu’elle mène, Karen se montre elle aussi tourmentée, à fleur de peau. Malgré son scepticisme, une once d’amour fraternel, dissimulée mais bien présente, persiste à lier les deux sœurs. A l’inverse, ce qui rapproche Barbara et Taylor, la brute de l’école, c’est leur haine mutuelle. Cette caïd ne supporte pas qu’on lui tienne tête, et Barbara représente justement sa plus grande crainte, l’insoumission face aux poings. De ce fait, elle va tout mettre en œuvre pour ruiner la vie de la jeune fille, physiquement et psychologiquement, par tous les moyens. Si Barbara est solitaire et introvertie, certaines personnes vont tout de même essayer de sympathiser avec elle, afin de la comprendre et de l’aider. C’est le cas de Madame Mollé par exemple, la psychologue scolaire, qui deviendra une sorte de figure maternelle de substitution grâce à la bienveillance dont elle fera preuve. Elle se montre persévérante et poignante face aux barrières instaurées par Barbara.  De même pour Sophia, la nouvelle voisine un peu candide de la chasseuse de géants, qui cherchera à sympathiser avec elle et à en connaître plus sur sa vie, quitte à outrepasser certaines limites de la curiosité. Pour résumer ma pensée en quelques mots, tous les personnages principaux d’I Kill Giants bénéficient d’une personnalité propre, marquée, qui les rend tous captivants à leur manière, avec une mention spéciale évidente pour Barbara Thorson.

Le scénario de Joe Kelly se montre captivant et surprenamment mature. Assez tergiversé sur le scénario de qualité proposé par Joe Kelly, attardons-nous désormais sur le trait de Ken Niimura. Très épuré et abrupte, je ne m’attendais pas à ce que ces dessins en noir et blanc puissent canaliser et propager tant d’émotions dans les visages de ses personnages. Grâce au style de Niimura, la lumière et les ténèbres occupent une place primordiale dans le récit. L’absence de lumière laisse entrevoir des abominations à glacer le sang. Toujours en jouant avec les couleurs, les créatures vues par Barbara obtiennent une dimension presque sacrée. Qu’elles soient réelles ou non, toutes sont magnifiées d’une étrange aura. Cette dernière se profile tout au long du récit. L’irrégularité de l’encrage sur les routes, sur les toits des maisons par exemple, crée une ambiance mystérieuse, où le doute plane continuellement sur la potentielle existence de monstres tels que ceux décrits par Barbara.

En plus des qualités indéniables de l’œuvre elle-même, soulignons aussi le soin apporté à cette nouvelle édition par HiComics. En effet, de nombreux bonus sont présents et ont tous le mérite d’en apprendre plus sur l’histoire ! En plus de lettres élogieuses d’Anders Walter, le réalisateur de l’adaptation cinématographique du livre, et de Chris Columbus, cinéaste bien connu des fans de Poudlard et producteur de Chasseuse de géants, une galerie de chouettes illustrations nous est proposée. Ensuite, le lecteur peut en découvrir davantage sur les coulisses et sur le processus de création d’I Kill Giants grâce à des explications des deux auteurs, puis grâce à des petits strips humoristiques vraiment poilants ! Avec tout ça, je peux vous assurer que nous tenons ici une édition complète et respectueuse du monument qu’est I Kill Giants !

Le scénario se révèle solide et suffisamment mystérieux pour captiver le lecteur dès les premières pages. En plus de ça, le style crayonné de Ken Niimura apporte une originalité graphique appréciable bien que déroutante pour un habitué de comics en couleur. Sous ses airs de récit jeunesse drôlement violent, I Kill Giants se révèle être une épopée poétique et sociale, aux antipodes que ce que la couverture peut laisser penser. Je recommande à tous, passionnés de bande dessinés comme néophytes, de vous plonger dans cette aventure miraculeuse. Chacun y trouvera son compte et sera transporté par le message d’espoir insufflé à cette histoire palpitante. Les dessins si atypiques de Ken Niimura associés à l’histoire poignante de Joe Kelly donnent un mélange inattendu, et un véritable chef-d’œuvre insoupçonné.

Cette review est terminée ! J’espère que j’ai réussi à vous partager avec justesse l’amour que je porte à I Kill Giants et que vous aurez envie de vous y intéresser. ^^ Je remercie HiComics pour m’avoir permis de réaliser cette chronique, sans eux, je serais passé bêtement à côté de ce comics incroyable ! Sur ce, je vous dis à bientôt pour de nouveaux articles. 😉

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.